- Est-elle utile pour affirmer sa (ses) différence(s) ?
- La gay-pride est-elle un mouvement de revendications politiques ou un évènement commercial et carnavalesque ?
- La presse renvoit-elle à l'opinion publique une image caricaturale des pédégouines? Ou bien est-ce les communautés gay et lesbiennes, qui en défilant, renvoit cette image ?
- La gay-pride dérange-t-elle les lesbigay en quête de respectabilité ?
- La gay-pride n'est-elle pas le lieu d'expression de la diversité gay et lesbienne avec ce qu'elle comporte de travesti, cuir, queer, butch, lipstick lesbien, BCBG, punk, ... ?
- Et si c'était seulement l'occasion de faire la fête ?
- La gay-pride doit-elle représenter l'ensemble des gays et lesbiennes ?
Premiers jours de printemps à Bruxelles, il est tentant de rester sur la terrasse du Kan'h...mais gueuler dehors n'est peut-être pas une bonne idée....
Du monde .... on s'habitue vite au succès.
Bon, ce n'est pas aussi mondain que le mariage du prince mais on reconnaît quelques têtes (sans chapeau). Pour commencer un peu d'histoire, rappelée par Chille lors de sa conclusion.
1969 : Stonewall : une bande de travelottes excédées par le harcèlement policier, et sans doute un brin désinhibées par l'alcool, rentre dans les flics à coup de sacoches et de hauts talons. Cet acte de résistance spontanée va se transformer en émeute. C'est cela, ce sont ces travestis en colère que l'on célèbre chaque année.
1979 : première Gay Pride à Anvers, suivie d'une seconde (1980 - Bruxelles) et d'une troisième (1981 - Anvers). Puis le vide pendant près de 10 ans et, en 1990, un samedi rose (Roze Saterdag) est organisé à Anvers. Il faudra attendre encore 5 ans pour que la Belgian and Lesbian Gay Pride, Roze Zaterdag-Samedi Rose soit créé. Depuis lors, une Gay Pride est organisée à Bruxelles chaque année.
Ce ne sera pas une gueulante très polémique : même si les avis sont parfois nuancés, ils sont rarement clairement opposés. Un seul gueulant fera un bilan très négatif des Gay Prides : en donnant une image non respectable des gays et lesbiennes la Gay Pride freine le progrès de certaines revendications, notamment celles liées à la parentalité (je vous dirais que je ne suis pas très convaincu par l'argument : on n'interdit pas aux étudiants de procréer sous prétexte qu'ils font les sots sur les chars lors de la Saint V à Bruxelles ! Mais bon, c'est peut-être plus respectable de faire les sots que les sottes).
En fait, cet argument sera relayé sous forme de questions : la Gay Pride est-elle un "outil" efficace pour faire passer des revendications, ou est-ce seulement un carnaval ? L'aspect commercial gomme-t-il le politique ? Il semble que ce ne soit pas si simple. Sans les "culs nus", les paires de fesses à l'air, les travelottes, les muscle queens exhibant leur pecs, les filles poitrines au vent, la Gay Pride n'aurait pas attiré les médias. Il faut bien admettre que les première Gay Prides n'étant pas quantitativement importante, il était efficace de se faire remarquer qualitativement. Pour certains, il serait intéressant de scinder l'évènement : une Gay Pride politique et revendicative et, à un autre moment, un "mardi gras" festif. Pour d'autres, il faudrait demander aux chars commerciaux de relayer les revendications de la Gay Pride.
Et chacun de rebondir sur ce que l'autre vient de dire. Parce que, en parlant de revendication, la Gay Pride n'est pas très subversive. Ce qu'elle propose est plutôt normalisant, non ? En parlant de normalisation, la Gay Pride n'a-t-elle pas une attitude "excluante" vis-à-vis de certains groupes moins "bcbg" (Club Radikal par exemple) ? Petit détour par l'histoire : lors de la Gay Pride 2000, les forces de l'ordre bruxelloises ont pris la Gay Pride comme "ballon" d'essai pour l'Euro 2000 (mais oui, souvenez-vous, quand Bruxelles a été envahie pendant un mois par une Hétéro Pride quotidienne d'êtres saouls ou vociférant faisant face à des robocops hallucinants). L'ancien pouvoir communal aurait espéré des troubles pour pouvoir aguerrir ces robocops. Mais, en l'absence d'incidents majeurs, nos amis en uniforme s'en sont pris au Club Radikal sans provoquer de réaction de la part du service d'ordre de la Gay Pride. Mais, affirment les organisateurs de la Gay Pride, le Club Radikal fait partie du paysage gay et lesbien; il n'est pas question de l'exclure, ni lui ni aucun groupe. Donc, à ceux qui rêvent d'une Gay Pride uniquement composée de personnes qui réclament le droit à l'indifférence plutôt que le droit à la différence, certains répondent : une Gay Pride, c'est aussi pour le tapettes, les cuirs, les queers, les butches, les fems, les culs nus, etc. Il faut de l'extravagance pour mettre en scène les différences !
Et puis, qu'est-ce que c'est que tous ces gens sur les trottoirs ? Une façon comme une autre de participer à la Gay Pride ou un banc de PD gouines honteux-ses ?
Et puis, les Gay Prides ce n'est pas uniquement dans les grandes villes qu'elles sont utiles : quand une Gay Pride est organisée dans un petit village au coeur de la Suisse catho (Sion-Valais), ça fait bouger les choses, ça délie les langues, le non-dit devient dit.
La Gay Pride, c'est aussi un phénomène international. Il y a des Prides partout dans le monde, là ou les droits de l'homme sont respectés, et les images parviennent dans les pays ou elles sont interdites. C'est pas mal ça, quand même. Et puis, même chez nous, rien n'est jamais acquis définitivement; alors, une Gay Pride pour montrer qu'on tient à nos différences...
Et puis, quelques idées en vrac :
Et si c'était aussi juste pour s'amuser ?
Et si la Gay Pride, c'était simplement pour mater ?
Et si on y allait doucement, pour laisser le temps au temps...
Et si on n'avait pas envie de laisser le temps au temps parce qu'il y a des urgences en termes de droits et de qualité de vie ?
Olivier Plasman
Avec Chille Deman de la Belgian lesbian and gay pride (BLGP)