do. 03/10/2002 - 21:30
Cinema Arenberg

Memento mori

Kim The-YongMin Kyu-Dong
1999Korea, Republic of
vo: ko
sub: fr

Dans un collège sud-coréen pour jeunes filles, Min-ah est déconcertée lorsqu'elle découvre un journal intime que deux de ses camarades rédigent de concert. Afin de pouvoir le lire plus en détail, Min-ah feint un malaise et est transportée à l'infirmerie. Là, elle est le témoin involontaire d'une étreinte amoureuse entre Hyo-shin et sa petite amie Shi-eun, les rédactrices du fameux journal. Mais quelques temps plus tard, alors que les filles s'apprêtent à passer l'examen de santé annuel, Hyo-shin se jette par la fenêtre. C'est à partir de ce moment-là que se manifestent dans l'école d'étranges phénomènes. (Allocine) Film fantastique, film d'épouvante, ou simplement film sur une passion entre filles dans un collège ? Les avis restent partagés. Mais ne cherchez peut-être pas trop à comprendre le comment et le pourquoi de l'histoire, laissez-vous plutôt emporter par les images... Jeune Lycéenne en pleine recherche de soi, Min-Ha (Kim Min-sun), découvre sur le chemin de l'école un journal intime abandonné. Intriguée, elle s'y plonge et découvre une histoire d'amour secrète entre deux jeune filles de son école, Hyo-shin (Park Ye-jin) et Shi-eun (Lee Young-jin). Cependant, alors qu'une vague de suicides touche l'établissement, les deux amoureuses se réconcilient après une première rupture. Mais leur histoire tourne au drame. Désespérée de chagrin Hyo-shin se jette du toit de l'école. A l'aide du journal, Min-Ha commence son étrange enquête qui la mènera au bord d'elle-même et de la mort. Premier long-métrage de Tae-yong Kim et de Kyu-dong Min, Memento Mori impressionne durablement par une description subtile et intense de l'adolescence, période de tous les doutes et de tous les tourments. Préférant au récit directement explicatif, une mise en scène plus impressionniste, les réalisateurs saisissent dans toute son étrangeté ce sentiment éphémère qui prend au cœur les jeunes gens, entre enfant et adulte. Véritable œuvre d'art, le journal intime du film devient la clé d'accès à un monde mystérieux, étranger que chacun de nous a dû un jour parcourir pour en revenir, hélas ! définitivement. Hyo-shin se suicide moins, peut-être, par chagrin d'amour que par désespoir. Désespoir de revenir d'un monde cruel et magique en perdant une part d'elle-même. Au contraire, Min-Ha à la fin de sa course, aura parvenu à faire coexister ces deux mondes là, à éprouver le réel tout en le distançant. Entre le magnifique « The Virgin Suicides » de Sofia Coppola (non pas comprendre le suicide de jeunes adolescentes mais pénétrer leur monde, éthéré et impitoyable) et la série japonaise animée « LAIN » (l'enquête fantasmatique d'une jeune fille sur le suicide d'une camarade de classe), Memento Mori capte avec beaucoup de nuances ce sentiment adolescent où l'on ose le mystère, l'invisible et où l'on se frotte à la mort et à l'amour, naïvement, romantiquement. Car au-delà d'un film assez juste, je crois, sur les pulsions suicidaires de certains adolescents, le film de Kim et de Min est aussi une description à la fois gracieuse et âpre de la naissance du désir. Et de fait, l'utilisation de ces voix-off télépathiques qui n'ont plus besoin d'exister à notre monde pour dire combien elles s'aiment est plus forte que n'importe quel discours. La cruauté du désir est de s'y laisser succomber. C'est ce que Hyo-shin apprendra à ses dépens. Les réalisateurs n'hésitent pas non plus à filmer les temps morts, les discussions interminables de jeunes chipies en socquettes, les pleurnichements, les brimades car une classe d'école est aussi ce lieu là : laboratoire cru et forclos d'un monde en devenir où les jeunes d'aujourd'hui jouent déjà à être les adultes (im)pitoyables de demain. Ce en quoi le personnage de Min-Ha est superbement écrit : en décidant d'enquêter sur cette histoire de désir qui n'est pas la sienne, elle découvre et accepte le sien. Car alors que Hyo-shin est vouée à se donner la mort, trop belle et trop pure, trop aimante, pas assez aimée, Min-Ha choisit la seule façon de grandir sans s'aveugler : éprouver et rêver. Sans doute, est-ce le choix de la vie. Malgré une fin bâclée qui fait intervenir un fantastique facile et qui copie outrageusement le Carrie de De Palma, Memento Mori est une réussite rare sur cette période nimbée de secrets terribles. Aussi, Il faut parler de ce plan apparemment banal : Après le suicide de Hyo-shin, l'éclatement de son corps sur le sol, Min-Ha laisse tomber une canette par la fenêtre. La canette tombe au ralenti et finit par s'écraser 15 mètres plus bas. A cet âge où l'on doute de sa propre existence, de sa visibilité aux autres, Min-Ha fait l'expérience du poids du corps. Elle éprouve son être et désormais, sait qu'elle existe, ici et maintenant. Memento Mori car se souvenir des morts pour mieux aimer les vivants. F. Arends

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Koninginnegalerij 28
Brussel